Robert Lighthizer,lors du sommet America First Agenda à Washington,le 26 juillet 2022. DREW ANGERER / GETTY IMAGES VIA AFP Dans l’équipe Trump,on connaît le colistier,J. D. Vance,40 ans,qui a grandi au sein d’une famille dysfonctionnelle,avec une mère toxicomane,dans la petite ville de Middletown,dans l’Ohio,aujourd’hui désindustrialisée. On connaît moins Robert Lighthizer,beaucoup plus âgé puisqu’il a 77 ans,mais lui aussi originaire de l’Ohio. Né à Ashtabula,au bord du lac Erié,l’ancien représentant au commerce de Donald Trump n’en finit pas de pleurer un monde révolu,celui où l’Amérique industrieuse produisait tout ce qu’elle utilisait.
« Quand j’étais jeune,ma ville natale était une ville américaine ordinaire,prospère et animée,l’une des nombreuses villes de ce type. » Mais,déplore-t-il dans son livre No Trade is Free (« aucun échange n’est gratuit »,HarperCollins,2023,non traduit),« de nos jours,les wagons-trémies ne déchargent plus beaucoup de minerais de fer,car de nombreux emplois dans l’industrie sidérurgique ont été délocalisés à l’étranger. Les emplois manufacturiers qui soutenaient l’industrie automobile à Detroit ont également diminué ». M. Lighthizer a la nostalgie des années Reagan,lorsque le président taxait les motos japonaises pour protéger l’américain Harley-Davidson,et voit dans la création de l’Organisation mondiale du commerce (OMC),et surtout dans l’adhésion de la Chine à l’OMC,en 2001, et dans l’accord Canada-Etats-Unis-Mexique de libre-échange,en 2020,la cause des malheurs de l’Amérique.
Il prépare son retour,au même poste ou peut-être à celui de secrétaire au Trésor,plaidant dans son livre pour un découplage quasi complet avec la Chine,ne plus octroyer à la Chine les avantages donnés aux autres membres de l’OMC et un commerce extérieur américain à l’équilibre. Pour cela,il prône une dévaluation du dollar et l’instauration d’un mécanisme pour compenser la TVA inexistante aux Etats-Unis et qu’il assimile à une taxe européenne sur les importations.
Prélèvement douanier
Discret,peu avenant,l’homme est dans l’entourage direct de Donald Trump : il a déménagé à Palm Beach,en Floride,à deux pas du resort néomauresque de Mar-a-Lago de l’ancien président et est administrateur « indépendant » de Trump Media,qui possède le réseau Truth Social. Comme l’écrivait dans la revue Le Grand Continent,en mai,Renaud Lassus,représentant de Bercy à l’ambassade de France à Washington pendant le premier mandat Trump,« Bob Lighthizer apporte une approche conceptuelle,analytique et professionnelle au service d’un patron qui n’en a pas ».Pour l’heure,il porte la parole de Trump à Wall Street : celle d’un prélèvement douanier de 10 % sur toutes les importations et de 60 % sur celles en provenance de Chine ainsi que la renégociation des accords avec le Canada et le Mexique,en 2026,comme le permet une clause de revoyure. Wall Street commence à prendre l’affaire au sérieux. « L’ancien représentant américain au commerce de Trump Robert Lighthizer a rencontré des groupes d’investisseurs et leur a dit que Trump pourrait annoncer des droits de douane chinois de 60 % et des droits de douane généraux de 10 % peu après son entrée en fonction »,écrit la firme d’analyse financière Piper Sandler,qui ajoute : « Nous nous attendons à ce que les tarifs douaniers soient imposés plus rapidement lors d’un second mandat de Trump que lors du premier. » La guerre commerciale déclenchée par Donald Trump n’avait commencé qu’en 2018,un an après son arrivée à la Maison Blanche,mais elle devrait survenir beaucoup plus brutalement s’il était réélu en novembre.
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